À Maurice, des ateliers de la seconde chance
Adeline
éducatrice d'enfants défavorisés
Adeline a passé un an comme volontaire DCC au sein d’une Communauté du Chemin Neuf, à l’Île Maurice. Au sein des Ateliers Techniques de Rivière Noire (ou ATRN), elle a pu accompagner des adolescents en décrochage scolaire. Elle nous partage sa rencontre avec ces jeunes difficiles, mais attachants.
Des ateliers de seconde chance
« Les Ateliers Techniques de Rivière Noire accueillent des jeunes de 12 à 16 ans en échec avec le système scolaire, et leur proposent des activités artistiques et manuelles qui vont du dessin à la cuisine, en passant par l’équitation, la sculpture sur bois, la soudure et l’électricité. Les Ateliers n’accueillent que 10 à 15 élèves : tous ont quitté l’école suite à un comportement difficile. Nombreux sont ceux qui ont été déscolarisés pendant une longue période. Aux ATRN, pas d’élève modèle: on réapprend à respecter le cadre, à suivre les règles, à être assidu et ponctuel.
Un apprentissage concret
Durant le premier trimestre, j’ai accompagné une enseignante qui menait un projet pilote d’alphabétisation fonctionnelle. Ce cours fait l’impasse sur l’alphabet et les syllabes, pour se concentrer sur du concret : connaître les chiffres, les dates, lire les noms des villes, pour pouvoir prendre le bus, remplir un chèque, un formulaire… Tout cela, en français et en anglais bien sûr.
C’est une pédagogie très intéressante : Ella, la formatrice, intéresse les jeunes grâce à des choses dont ils ont besoin. Ils font l’effort car ils en voient le bénéfice immédiat. Plus les modules avancent, plus les jeunes vont trouver goût à la lecture et, au final, demander par eux-mêmes comment orthographier certains mots.
Des débuts difficiles et un déclic salvateur…
Ça, c’est sur le papier… Dans les faits, mes premiers temps aux ATRN n’ont pas été des plus faciles. Les enfants criaient et se battaient, s’insultaient, sortaient à leur guise, regardaient leur portable… C’était aussi des jeunes qui parlaient un créole incompréhensible pour moi, et qui en profitaient! En bref, je me sentais assez mal à l’aise. L’expérience d’Ella m’a vraiment aidée. Au final, ils sont plusieurs à avoir fini le programme et une remise des certificats a été organisée en novembre 2018, en présence des parents.
Je crois me souvenir que le « déclic » a eu lieu une matinée: le cours était annulé, je n’en étais pas informée. Le responsable m’a proposé de le remplacer par une balade dans les gorges, un grand parc naturel. Je suis partie sans comprendre que j’allais être seule pour gérer tous les garçons, dans une forêt où je n’avais jamais mis les pieds ! Alors que j’étais inquiète, j’ai passé un très beau moment. Les jeunes étaient étonnamment attentionnés : ils me guidaient, me racontaient l’histoire du lieu, me montraient la végétation et me tendaient même une main secourable pour traverser les ruisseaux. Quelle métamorphose ! Nous avons atteint une rivière où ils ont nagé et sauté du haut de rochers. L’heure de rentrer venue, ils sont sortis de l’eau sans broncher et nous sommes rentrés tranquillement. Cette matinée m’a permis de les voir sous un autre jour! »
Grâce aux activités proposées, les jeunes en décrochage scolaire reprennent confiance en eux.