Nathalie est volontaire DCC et psychomotricienne dans un hôpital français à Jérusalem. Elle nous raconte son expérience de volontariat et d’interculturalité au service des autres.
C’est en lisant un article dans une revue de la congrégation des Augustins de l’Assomption en 2010 que j’ai découvert le volontariat. A ce moment là j’étudiais l’hébreu biblique, et je me disais que Jérusalem était le lieu idéal pour continuer à progresser. Mais je travaillais et avais des enfants étudiants à charge. Quand, à 58 ans, j’ai enfin candidaté à la DCC, j’acceptais par avance le choix qui me serait proposé…et j’ai été envoyée à Jérusalem !

L’hôpital français Saint Louis est le plus ancien hôpital de la vieille ville de Jérusalem. Après avoir été longtemps polyvalent, il est maintenant spécialisé dans les soins palliatifs et accueille aussi un service de gériatrie. Je suis psychomotricienne et je travaille avec l’équipe thérapeutique constituée d’une animatrice, un ergothérapeute, une kinésithérapeute, une assistante sociale, une diététicienne, une infirmière chef (française) et plusieurs médecins. Le staff médical s’exprime en hébreu. Mais au sein de l’hôpital, c’est l’arabe et l’anglais qui sont le plus souvent utilisés. Car les patients accueillis sont juifs, chrétiens ou musulmans, et chaque religion est respectée, avec la cacheroute et les fêtes que nous célébrons ensemble.
Je ne suis pas la seule volontaire : je vis en colocation dans l’enceinte de l’hôpital avec une dizaine de jeunes femmes qui travaillent comme care givers (aides-soignantes) en soutien aux salariés de l’hôpital. Elles sont françaises, allemandes, brésiliennes…Cela donne une ambiance plutôt joyeuse, même si le travail est difficile et assez fatigant. L’humour est toujours présent, avec la tendresse !

A Jérusalem, j’ai la joie de rejoindre régulièrement ma famille spirituelle dans la communauté assomptionniste de Saint Pierre en Gallicante. Je m’y ressource souvent grâce aux discussions fraternelles autour d’un repas ou d’une bière, et aux messes au-dessus de la vallée du Cédron et du village musulman de Silwan (où les chants des coqs se mêlent aux appels du muezzin).

Je passe aussi beaucoup de temps à visiter les lieux saints, les musées, les sites archéologiques. Je fais de belles rencontres et ma foi s’approfondit. On ne vient pas par hasard à Jérusalem et beaucoup d’habitants actuels ont fait le choix d’immigrer, ou juste de rester après un séjour, parce que c’est une ville religieuse où la foi est une évidence. Mes deux plus proches collègues sont musulmanes, arabes israéliennes. Ma professeure d’hébreu (moderne !) est juive. Ici on dit que la paix entre ces deux peuples est impossible. Pourtant, au quotidien, je vois du respect, de l’intérêt et même parfois une amitié profonde entre des juifs et des arabes chrétiens et musulmans. L’hôpital est un lieu privilégié pour apprendre à se connaître car nous vivons ensemble au plus près des patients et nous sommes tous à leur service, familles comme salariés. Ici, le mot « distance professionnelle » qu’on nous enseigne en France n’est pas de mise : donner de l’affection est aussi important qu’aider aux repas, faire une toilette ou sortir manger une glace ensemble.

Mes plus grandes joies sont de voir danser main dans la main tous ceux qui le peuvent sur des musiques de Fairuz, la fameuse et bien-aimée chanteuse libanaise ; et accompagner Daniel et Abraham quand ils entonnent les chants de Shabbat, eux qui sont le plus souvent silencieux. J’ai aussi souvent été touchée par de sages paroles entendues à l’hôpital : « il faut accepter comme un cadeau tout ce que Dieu nous donne, la jeunesse comme la vieillesse, la maladie comme la bonne santé, car le plus important, c’est de savoir qu’Il nous aime ». Ou encore, à la suite d’un débat sur la fin de vie avec Hamsa, ma collègue préférée : « Ce n’est pas la vie que nous respectons ici, c’est la vie de Sarah, de Mohamad, de Sylvia… », ça change tout !