6 mois de mission solidaire avec Florence !

Je suis partie six mois de février à juillet chez des dominicaines à Cuba. Ce sont 3 Colombiennes en mission apostolique à Perico, un village à 3 h à l’est de La Havane, dans les terres. Je devais être encadrée par la plus jeune sœur hermana Gladis mais celle-ci était partie en vacances chez sa famille en Colombie et n’a jamais pu rentrer à Cuba à cause de la Covid. J’étais donc avec hermana Mercedes (70 ans) et hermana Yolanda (82 ans).
Ma mission consistait à accompagner hermana Mercedes chez les personnes âgées et malades pendant la semaine. Le week-end, j’aidais pour le catéchisme dans les quatre paroisses à Perico et aux alentours, et j’animais le groupe de jeunes de Perico.
Je logeais dans une chambre attenante à l’église de Perico et prenais mes repas chez les sœurs. J’aidais pour le ménage, la cuisine et la liturgie.
 
Comment cette expérience a-t-elle influencée ma philosophie de vie ? Ma manière de voir les relations humaines ?  Spirituellement, comment ai-je vécu cette mission ?
J’ai appris à vivre au quotidien avec des personnes âgées. C’est une belle aventure. La différence de génération est un obstacle à la communication mais il n’est pas insurmontable.
 
J’ai appris la patience, l’écoute, le silence, la simplicité et la joie devant les petites avancées de la vie commune au quotidien.
 
 
Cuba est une île extrêmement appauvrie par le système communiste. Par divers aspects, elle s’apparente à certains pays pauvres d’Afrique (le manque de nourriture et d’objets du quotidien, l’état des routes, des bâtiments, les moyens de transport, etc). La conséquence directe pour une européenne comme moi est un énorme sentiment d’impuissance face aux problèmes des personnes qui m’entouraient. Je ne pouvais pas changer le système, je pouvais juste être présente, les écouter.
 
Spirituellement, cette mission était un vrai cadeau de Dieu.
 
J’ai pu Le rencontrer tous les jours grâce à la messe quotidienne. Mes journées étaient ponctuées par les laudes, les vêpres et parfois les complies. J’ai approfondi ma connaissance de la Bible par ma lecture personnelle et la préparation des activités pour le catéchisme. J’ai expérimenté Sa présence dans des moments de découragement, de solitude, de grande tristesse et dans la confession. Dans les moments de joie, pendant les célébrations ou chez les Cubains, Il était particulièrement présent, bien vivant au milieu de nous.
 
Quel est mon plus beau souvenir de mission ?
A vrai dire il n’y en a pas qu’un, il y en a tellement que je ne pourrais tous les raconter. En voici un : lors de la dernière messe dominicale dans une des paroisses juste avant mon départ, j’ai joué après la messe avec les enfants. Il pleuvait, alors nous avons joué dans l’église. On a joué à « un, deux, trois soleil ». Ils étaient surexcités. Le sol glissait beaucoup. Deux petites me tenaient chacune une main. Quand les enfants se mettaient à courir, ils glissaient de tout leur long sur le sol et ça les faisait énormément rire. Je riais aussi. Je me sentais particulièrement bien, naturelle, avec ces enfants. Je sentais que je les aimais profondément et qu’ils m’aimaient aussi beaucoup.
 
A quelles épreuves ai-je été confrontée ? Comment y ai –je fais face ? 
Ma mission n’a eu strictement rien à voir avec ce que je m’imaginais. Au début ça m’a fait un coup. Il fallait accepter, accueillir, c’était dur. Je ne pensais pas être tout le temps avec des personnes âgées. Les enfants et les jeunes que je ne voyais que le week-end me manquaient beaucoup. Je me sentais inutile quand on visitait les malades. J’avais aussi du mal à communiquer avec les sœurs, qui étaient assez silencieuses et qui n’étaient pas de ma culture. Je me suis sentie seule.
La confession m’a beaucoup aidée. J’ai patienté, attendu et fait des efforts pour communiquer sur ce qui n’allait pas. Les sœurs ont fait beaucoup d’efforts pour que j’aille mieux. Le prêtre de la paroisse, un missionnaire polonais, a tout fait pour que ma mission s’enrichisse: que je puisse avoir des activités plus variées et voir d’autres personnes.
 
Ai-je eu le sentiment d’avoir eu un impact pour le développement ? Comment cela s’est-il traduit ? 
Eh bien pas vraiment. Justement, je pensais pouvoir être utile, changer des choses, amorcer de nouvelles activités dans la paroisse. J’ai tenté de monter un chœur d’enfants sur l’idée d’une des paroissiennes. Mais rien ne s’est passé ainsi. Le confinement a empêché la réalisation de cette chorale d’enfants tandis que mes velléités de « changer le monde » étaient bien inadaptées à la situation concrète de Perico. Je souffrais beaucoup de cette impuissance.
 
Un jour, j’ai compris qu’il ne s’agissait pas de faire mais simplement d’être. Être là. C’est ce qui comptait le plus pour eux.
 
 
Une rencontre qui m’a marquée pendant ce volontariat ? Pourquoi ? 
Le prêtre missionnaire polonais. Dans le schéma initial de ma mission, il n’existait pas. A vrai dire, je n’avais même pas pensé au prêtre de la paroisse: pour moi, il y avait les sœurs et c’est tout. Mais Dieu a beaucoup d’humour et Il nous surprend toujours. C’est avec le prêtre que j’ai le mieux communiqué car nous venons du même continent. Il s’occupait beaucoup des enfants et des jeunes, il m’a donc délégué beaucoup d’activités avec eux. Il était aussi un intermédiaire entre les sœurs et moi car il les connaissait bien. En fin de compte, c’est une belle équipe que nous avons formée, les sœurs, le prêtre et moi. Nous continuons de nous donner des nouvelles.
 
Je suis rentrée en France il y a peu, quels sont mes projets à mon retour ?
Le retour en France a été difficile et brutal, même si j’ai eu la chance de pouvoir rester les six mois complets malgré la pandémie. Heureusement que le mois d’août faisait une transition avec la reprise des études. Je commence un master recherche en histoire de l’art à l’ENS et à la Sorbonne. Étudier de nouveau après une expérience si différente, si transformante, n’est pas très naturel… J’espère pouvoir y retrouver du goût. Je ne peux pas nier que Cuba me manque et que j’ai envie d’y retourner mais ma place est en France et je le sais.
 
J’aimerais préparer ma confirmation. C’est tout à fait dans la continuité de ma mission et cela va me redonner de l’élan.